Contexte et questions scientifiques
La présence avérée de pesticides dans les eaux constitue une menace pour la ressource en eau, la santé humaine, le fonctionnement des écosystèmes aquatiques et la biodiversité. Or, l’évaluation des risques associés pour les masses d’eau et la recherche de solutions cohérentes pour les réduire relèvent de questions complexes, à caractère fortement pluridisciplinaire. Par ailleurs, le recours à des observations de terrain aux échelles de temps et d’espace adaptées s’avère essentiel pour mieux cerner les impacts réels et leurs causes, afin d’y remédier.
Dans ce contexte, le site Ardières-Morcille (SAAM) est depuis plus de 30 ans le lieu de recherches et d’actions de développement visant à mieux comprendre et limiter les conséquences négatives des actions anthropiques, et notamment de la viticulture, sur le fonctionnement des écosystèmes aquatiques. Il a été labellisé site atelier de la Zone Atelier du Bassin du Rhône (ZABR) en 2007. Ses travaux s’inscrivent notamment dans l’objectif global de parvenir à une meilleure compréhension de la chaîne pressions-expositions-impacts, appliquée aux produits phytosanitaires.
Principales questions scientifiques actuellement abordées sur le SAAM :
- Quels sont les déterminants du transfert et de la dynamique spatio-temporelle des produits phytosanitaires vers, et dans les cours d’eau ?
- Quels sont leurs impacts chimiques, biologiques et écologiques sur les écosystèmes aquatiques, ainsi que les trajectoires de récupération ?
- Comment améliorer les méthodologies de biosurveillance et développer des marqueurs d’effet biologique à différents niveaux d’organisation ?
- Quelles sont les voies de restauration possibles au niveau du bassin versant (zones tampons, organisation du paysage) ?
- Quels sont les freins et leviers du changement de pratiques (notamment aux niveaux social et humain) ?
Pour en savoir plus
Les recherches reposent sur des collaborations scientifiques et opérationnelles pour le développement des connaissances mais également d’outils et de méthodes en appui aux politiques publiques.
- méthodologies de diagnostic et de mise en œuvre de zones tampons,
- modèles d’appui au choix de scénarios spatialisés de changements de pratiques et d’aménagements au bassin versant,
- indicateurs d’impact chimique et biologique et de gains écologiques attendus suite à une diminution des pressions.
Les données recueillies dans le cadre des opérations de recherche, de suivi ou de gestion sur ce site sont de nature physique (hydrologie, pluviométrie, pédologie, occupation du sol, relief, réseau de fossés, …), chimique (apports anthropiques, concentrations dans différents compartiments de l’environnement) et biologique (invertébrés aquatiques, algues, microorganismes aquatiques).
Ce bassin est aujourd’hui un site de référence dans le cadre de différents programmes de recherche ou opérationnels et réseaux de sites :
- Au sein de la ZABR, le SAAM contribue à l’étude des conséquences de l’anthropisation sur le fonctionnement des écosystèmes aquatiques en milieu agricole ;
- le SAAM fait partie des sites inclus dans le projet de réseau de bassins versants RECOTOX, visant à coordonner et consolider l’observation et l’expérimentation dédiées à l’écotoxicologie et à la toxicologie (co-animation INRAE et CNRS).
En bref
Les mots clés :
contaminations d’origine agricole – produits phytosanitaires – bassin versant – qualité des milieux aquatiques – processus multi-échelles – zones tampons – développements analytiques – expérimentations et suivis in natura – modélisation – exposition – impacts – perception des acteurs – stratégies d’échantillonnage – transferts.
Les dispositifs et disciplines :
- Une station fixe de mesures physiques et d’échantillonnage sur la Morcille depuis 1990.
- Un point de mesure RCS à St Jean d’Ardières et un suivi renforcé au Pont de Pizay (Ardières) à partir de 2011.
- Des suivis complémentaires chimiques et biologiques dès 1987, plus réguliers depuis 2003 et renforcés à partir de 2008 sur a minima 6 stations avec identification de gradients amont-aval.
- Une bande enherbée et une parcelle de vigne instrumentées.
- Une douzaine d’équipes avec des disciplines diversifiées : Hydrologie, Chimie, Biologie, Écotoxicologie, Sciences du sol, Agronomie, Sciences humaines et sociales, Sciences de l’Ingénieur.
Description du site
Le site d’étude se situe dans le nord du Beaujolais qui est particulièrement vulnérable aux transferts de produits phytosanitaires combinant un milieu fragile (des sols peu profonds propices aux écoulements rapides et à l’érosion), une culture peu couvrante et sensible aux maladies, aux ravageurs et à la concurrence hydrique et azotée, des pluies printanières et estivales pouvant être de très forte intensité.
Ce contexte se traduit aujourd’hui par un recours fréquent aux produits phytosanitaires (fongicides, herbicides et dans une moindre mesure, insecticides) et une contamination marquée des cours d’eau.
Un contexte propice à la mise en place d’actions pour la restauration de la qualité de l’eau et des milieux aquatiques
- Le Beaujolais est classé « zone d’action prioritaire » de la Cellule Régionale d’Observation et de Prévention de la Pollution par les pesticides, et le site Morcille est un site pilote pour la mise en œuvre de diagnostics et de solutions correctives,
- Le captage d’eau potable de Saint Jean d’Ardières est classé captage prioritaire du Grenelle de l’Environnement,
- Le contrat des rivières du Beaujolais, porté par le Syndicat Mixte des Rivières du Beaujolais a été signé en 2012.
Le SAAM est constitué de deux bassins versants emboités, les bassins de la Morcille et de l’Ardières, caractéristiques du nord du Beaujolais.
Les études antérieures ont montré que ces bassins versants sont particulièrement propices au transfert de pesticides vers leur cours d’eau, notamment via le ruissellement de surface, mais également les transferts latéraux. Elles ont notamment mis en évidence des concentrations élevées en pesticides en régime de crue et un impact sur les écosystèmes aquatiques.
Sur ces bassins, la gestion des voies de circulation de l’eau par l’installation ou restauration de zones tampons et l’aménagement des fossés est primordiale, compte tenu de la rapidité des écoulements de surface. Les recherches menées ont montré l’efficacité de tels systèmes dans ce contexte.
Une des problématiques majeure actuellement développée sur le SAAM est de mieux comprendre et modéliser les liens entre pressions chimiques et impact écotoxicologiques au sein des cours d’eau en intégrant la complexité des processus, la vulnérabilité des milieux et le rôle des éléments du paysage (régulation, connectivité fonctionnelle, biogéochimie, trophie, …).
Le bassin versant de la Morcille (8 km²) est un site expérimental historique d’Irstea. Suivi dès 1986, il fait partie des premiers sites en France ayant permis de mettre en évidence une contamination des eaux de surface par les produits phytosanitaires.
Le suivi plus récent du bassin versant de l’Ardières (150 km²) permet d’aborder la problématique du changement d’échelle mais également d’élargir la gamme des pressions et de mobiliser des acteurs diversifiés.
Pour en savoir plus
Historique des recherches sur le SAAM :
1987 | Mise en évidence d’une perturbation des édifices biologiques et premiers travaux de recherche des causes de la contamination
Mise en place d’un suivi hydrométrique et qualité |
1987, 1994, 1999, 2001, 2007, 2010, 2011 | Enquêtes phytosanitaires |
1994 | Première réflexion sur l’aménagement des écoulements de surface |
2001-2006 | Diagnostic des parcelles à risque par rapport aux transferts de surface |
2003 | Début des travaux de recherche sur l’impact écologique |
2003-2006 | Étude de l’influence globale d’une bande enherbée |
2005-2007 | Suivi spatio-temporel de la contamination en phytosanitaires et quelques métabolites |
2006 | Labellisation site atelier de la ZABR |
2006-2016 | Stratégies d’échantillonnage (actif et passif) |
2009 | Initiation des travaux de modélisation spatialisée |
2011-2016 | Travaux plus approfondis sur les transferts latéraux de sub-surface |
2012-2015 | Test d’un panel d’outils intégratifs pour évaluer l’impact des pratiques sur les cours d’eau
Début des recherches en sciences humaines et sociales sur le site |
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